L’automne s’effeuille,
S’évente à vue d’œil,
S’efface et cède la place
Aux froideurs calorivores
Qui consument et dévorent
Les derniers soupirs
D’une tiédeur chancelante,
Derniers souvenirs
D’une chaleur déclinante.
L’hiver arrive, aride,
Apprêté du froid mordant
Qui nous aspire et nous pompe,
Nous vide et nous laisse coi
En proie à l’effroi,
Nous vide et nous laisse béant
En pâture au néant.
Ralentis jusqu’à l’hallali,
Cryocloués au lit,
Vaisseaux comprimés
Et sang solidifié,
Les cons gelés
Restent prisonniers,
Immobiles, inertes
Au milieu du monde
Qui révolutionne sans fin,
Vire et volte et valse
Autour de son axe,
Sourd aux suppliques
Des somnambules esseulés,
Sourd au silence
Des cœurs délaissés
Et des corps gelés.
Ne reste qu’un songe fugace
Pour traverser cette saison de glace,
Le souvenir, presque oublié,
De la douce chaleur de l’été,
D’un autre temps consumé, calciné,
Qui pour toute trace n’a laissé
Qu’éphémères visions
Amputées des sensations,
Intuitions d’une ancienne transe
Et espoir d’une nouvelle danse.
Lors sous l’influx de l’hippocampe
Afflue l’évocation distante
De ces cœurs qui se chamadaient
Ces corps qui se chamaillaient
Ces bouches qui se fusionnaient
Ces lèvres qui s’humectaient
Et ces esprits qui s’envolaient
Planaient dix mille pieds sous mer
Plongeaient a capella
Aux cieux capitonnés
Brandissaient à l’unisson
Le tison de la déraison
En étendard sulfureux
D’un entêtant mélange de sentiments,
Arme de construction massive
De légèreté, de liberté,
De passion et de fusion,
Cocktail Molotov au goût de Mazel Tov,
Cocktail détonnant au parfum enivrant,
Cuisine aphrodisiaque
Servie par une Lissa
Aux saveurs paradisiaques.
Mais il est fini le temps des cerises,
Il a suffi qu’un « e » se défasse
Pour en faire le temps des crises,
Se retrouver pris dans la nasse,
Subitement raide, stoppé sur place,
Ponctionné de tout élan,
Euthanasié des sentiments,
Orphelin des émotions,
À jamais privé de passion.
Car largué sur la banquise,
Sans tarder on apathise
Face à cet horizon, immensité
Que rien ne peut dégeler,
Peu importe le chemin parcouru
Le doute n’est que vérité nue :
Le soleil a disparu.
Ressentirai-je un jour encore
Sa chaleur réchauffer mon corps ?
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