Un mois d’août, un jour de pluie. 

Un arbre mouillé, des branches imprégnées. 

La mousse parasite, elle aussi est gorgée, rincée par l’ondée. 

Les feuilles frémissent, dans cet air sans un souffle, sous l’impact des bulles, liquides, qui les percutent et les vrillent. 

Les cieux sont lumineux, le soleil filtre ; lumière blanchâtre d’un fantôme maladif. Les branches en deviennent argentées, elles s’en trouvent déguisées, luisant, sous l’astre, d’une aura patentée. 

Les nuages passent à la moulinette d’une naïade insolente. Ce réservoir est haché, l’eau qui en tombe en est déchiquetée ; ses lambeaux arrosent Gaïa sans discontinuer. 

Un phasme de bois, gargantua posé là, enraciné sous son poids, observe la scène d’un ton pantois. Ses extrémités dénudées n’offrent même plus d’abris, à cette mousse qui l’envahit. Son crâne dégarni témoigne de sa déjà longue vie, de son existence indéfinie. 

Mais son intimité encore, recèle quelque trésor. Sous son écorce brune loge un Odelune, créature mirifique et nocturne. 

Le mythe, attiré par les gouttes, pose patte dehors, et goûte le temps, d’une paume laiteuse, presque floue. Pataugeant dans la mousse, il s’aventure sous l’averse, ouvrant ses sens, à cette contrée qui l’apaise. 

Fasciné il observe, il regarde le bruit, de l’eau qui explose près de lui. Le son est harmonieux, en palette de pastels : ocres, oranges et turquoises se mêlent. Plus loin sur les branches nues, la musique est plus nette : une symphonie de couleurs, vives et éclatantes, parfument l’air de rouges, jaunes et verts. 

Ouvrant les lèvres, il frétille de la langue, pour déguster ces effluves, colorées et odorantes. Agile il en attrape, les croque. Les couleurs en son palais se fendent, libèrent des notes cristallines. Elles résonnent dans sa bouche, et dégringolent en cascade, lui chatouillant le larynx, le réchauffant au passage. 

L’Odelune enivré, se met alors à danser, invitant la rosée, à partager ses pas endiablés. Valsant virevoltant, tournoyant ondulant, le couple réveille ainsi, la faune des sous-bois endormis. La nature s’étirant, offre un concert de couleurs, parfumant toute la lande, en petites notes claires. 

Le Soleil alléché, par cette fête improvisée, décide de s’inviter à goûter, ces odeurs scintillantes et dorées. Ouvrant les ailes il s’étire, écartant les nuages qui masquent son plaisir. Ses tentacules lumineux, accrochent les gouttes, suspendues tête en bas, sous les bois paresseux. Réfléchissant au contexte, les gouttes alors se mettent, à diviser pour faire régner, les rayons du disque doré. Au ciel un arc se forme, reliant par cette arche, l’avant et l’après, de ce monde arrosé. 

Réchauffés par le tumulte, les prés s’agitent. Une brume comateuse, en monte alors bien vite. Le coton ajoute, à l’aura de mystère, sa part de mystique, parfumée de terre. L’Odelune en ce brouillard, s’escamote sans retard : le Soleil revenu, ce petit être a vaincu. 

La mousse parasite, est encore gorgée, rincée par l’ondée. 

L’arbre est mouillé, ses branches imprégnées. 

Mais la pluie a fui, ce beau jour d’été.

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