Une “Brève” et non une chronique complète, pour parler rapidement de l’intérêt de ce jeu sur le plan narratif, sans analyser l’ensemble du titre ni divulgâcher l’intrigue. 

Cet article ne traite que de The Witcher III, seul jeu de la série auquel j’ai joué ; mais par abus de langage, je risque d’omettre le « III » par la suite. 

J’ai failli me perdre dans ce jeu. D’un certain côté, ça m’a rappelé Morrowind (série The Elder Scrolls). Jeu dont je n’ai jamais fini l’histoire principale, tellement le contenu était riche et dense. De quêtes secondaires en événements annexes, j’ai fait ma vie dans cet univers sans jamais aller au bout de la quête principale. 

The Witcher, c’est un peu pareil : de vastes régions à explorer, des quêtes secondaires à foison, des événements ou des trésors qui se révèlent lorsqu’on s’approche d’une zone particulière. Des personnages à rencontrer, des monstres à éliminer, un bestiaire à compléter, de l’équipement et des potions à fabriquer… On peut littéralement passer des heures dans cet univers sans progresser sur le chemin de la quête principale. 

Comme à mon habitude, j’ai donc commencé par vouloir tout faire, tout voir, tout explorer, tout sauver. Impossible sans y passer de longues heures, dans un gameplay qui devient finalement assez répétitif. Non pas que les mécaniques soient mauvaises, mais une fois maîtrisées, toutes les quêtes se ressemblent plus ou moins : même si l’objectif et l’environnement changent d’une fois sur l’autre, on se retrouve à pister, enquêter, discuter, pourchasser, explorer, exterminer, dans un ordre plus ou moins quelconque. 

Ce qui fait vraiment l’intérêt du jeu, outre quelques combats épiques, c’est la richesse de l’univers, le nombre de personnages principaux ou secondaires qui ont tous leur rôle à jouer et leur histoire personnelle, ainsi que les objectifs propres à chacun. L’intérêt de ce jeu, c’est les histoires qu’il renferme, qui sont racontées à travers toutes ces quêtes et éléments de gameplay. 

La narration elle-même fait appel à des mécanismes très courants pour donner des éléments de lore et avancer dans les récits : discussions avec les PNJ, conversations entre PNJ glanées au détour des chemins, livres, panneaux indicateurs, cinématiques, etc. Seul élément que j’ai trouvé particulièrement intéressant, c’est la façon dont le récit, dans sa globalité, est construit non pas via la seule aventure du héros, mais par l’agencement des différentes briques que sont les aventures de chaque personnage rencontré. L’histoire ne se dévoile donc dans son entièreté qu’en considérant toutes les histoires individuelles. Le tout est finalement très propre, très cohérent, et fidèle à cet univers transmédia qui se décline en livres, jeux vidéo et série télé. 

Pour moi, ce qui fait la force de The Witcher dans tout ça, c’est l’implémentation du récit et les choix proposés au joueur. Car souvent, dans mon expérience de joueur, les choix rencontrés sont assez anodins. Ils ont un impact limité sur la trame narrative, et n’offrent que des chemins alternatifs assez courts, qui finissent toujours par converger vers le même point sans plus de conséquences. 

Dans The Witcher, chaque choix a des conséquences. Importantes. Et qui peuvent ne se révéler que bien plus tard dans le récit. La situation politique ou le soutien que pourront vous accorder les alliés que vous vous ferez, ou non, au fil du jeu, dépendent des choix que vous ferez tout au long de votre parcours. Il y a ainsi plusieurs options possibles pour arriver au même objectif. Ce qui ne change pas radicalement l’histoire globale, mais qui renforce vraiment le sentiment de vivre une aventure unique, car on a une certaine liberté dans l’approche. 

Autre caractéristique qui m’a marqué : à la différence de tout ce que j’avais vu jusqu’ici, les choix proposés ne sont pas manichéens, et il est parfois nécessaire de pactiser avec des antagonistes pour arriver à nos fins. D’ailleurs, les antagonistes ne sont pas opposés par principe au héros, ils suivent leurs propres objectifs, ce qui les mets parfois en opposition au héros ; mais peut aussi les amener à s’associer au héros à un autre moment en cas d’intérêts convergents. Et le héros lui-même n’est donc pas non plus pur par essence et sans reproches. Tout ceci rend le développement de tous ces personnages très abouti et très intéressant. 

Pour en revenir aux choix, il n’y a donc pas forcément de « bonne » option, au sens du Bien, de la morale ou de l’éthique. Mais on ne s’en rend compte généralement qu’a posteriori, quand les conséquences se révèlent. Par exemple, un trio de sorcières détient des informations. Réputées puissantes, il est déconseillé de les affronter. Une solution est donc de leur rendre un service en paiement : un esprit ancien corrompt une partie de leur territoire via une puissante malédiction, et menace leurs intérêts. Il faut l’éliminer. Arrivé sur place, on se rend compte que l’esprit a été emprisonné là par les sorcières, qui ne peuvent le tuer. Ennemi ancestral des sorcières, il promet de lever la malédiction et de sauver les enfants enlevés par les sorcières, si le héros le libère et le laisse en vie. 

Alors, que faire ? Aider l’esprit au risque de devoir affronter le courroux des sorcières et renoncer aux informations qu’elles détiennent ? Ou éliminer l’esprit pour honorer l’accord avec elles, en sachant que cela condamne certainement les enfants enlevés ? 

Tout ça pour se rendre compte ultérieurement que les sorcières perçoivent immédiatement que l’esprit est libéré, et tuent les enfants en représailles. Le choix qui paraissait le plus « moral » (sauver les enfants) conduit en fait à leur perte. Le héros devra vivre avec les conséquences de ses choix, et l’image du héros juste, invincible et bon par nature est réduite en poussière, à l’opposé des clichés habituels où, même si le héros lutte et doit faire des choix difficiles, il les fait en conscience et pour le bien commun, en sacrifiant une partie de son humanité, ce qui est vu comme un acte de grande noblesse. 

Finalement, tous ces éléments font de The Witcher un jeu très adulte, dont l’intérêt premier réside dans les choix de progression du récit et la richesse de développement des personnages secondaires, dont les histoires personnelles, très fouillées, s’entremêlent pour tisser la toile narrative générale. Après une petite pause pour visiter d’autres univers, il faudra que je retourne dans la série du Witcher pour cette fois aller au bout des DLC.

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