Une “Brève” et non une chronique complète, pour parler rapidement de l’intérêt de ce jeu sur le plan narratif, sans analyser l’ensemble du titre ni divulgâcher l’intrigue. 

Hadès est un roguelike, c’est-à-dire un jeu dans lequel la progression est difficile et nécessite un apprentissage continu pour s’en sortir. En cas d’erreur, la punition est la mort et l’obligation de recommencer, soit le niveau en cours, soit depuis le dernier point de sauvegarde, soit carrément du début… Mais avec la satisfaction d’avoir découvert un nouveau piège, un nouvel ennemi mortel, et appris comment l’éviter à la prochaine tentative (ou « run »). 

Dans Hadès, quand on meurt, on doit recommencer du début. Mais en ayant gagné des ressources au passage, ce qui nous permet d’améliorer petit à petit nos compétences, et donc nos capacités de survie. La mort n’est donc pas inutile, ni juste une question d’apprentissage. 

Rapide remise en contexte : le joueur incarne Zagreus, fils d’Hadès, et désireux de s’échapper du royaume des enfers gouverné d’une main implacable par son père. Ce dernier va tout faire pour empêcher son fils de s’évader, ce qui constituerait un affront impardonnable. Zagreus a quant à lui un autre but que la simple évasion, mais je n’en dirais pas plus pour ne rien divulgâcher. 

Sur sa route vers l’évasion, Zagreus va donc rencontrer diverses créatures qu’il lui faudra renvoyer dans les limbes pour passer à la salle suivante, et ainsi progresser vers la sortie. 

Le jeu pourrait paraître procédural, car le chemin emprunté est toujours différent, mais en fait l’agencement des salles et les ennemis rencontrés répondent à un processus particulier : toutes les actions du joueur influent sur l’algorithme pour déterminer quelle sera la salle suivante. Ce point est intéressant, car tout aléatoire que soit ce mécanisme en apparence, il s’agit en fait d’un immense arbre qui permet de prédire l’enchaînement des salles, pour peu que l’on puisse identifier et cartographier toutes les actions possibles et leurs effets sur cette « carte » du royaume d’Hadès. 

Ce qui est fantastique, c’est que la communauté des joueurs d’Hadès a réussi ce travail titanesque : pour pouvoir finir des runs à la difficulté maximale, il fallait en passer par là. Le fait que cette tâche a été accomplie en dit long sur l’implication des joueurs et des joueuses sur ce jeu. 

Refermons cette parenthèse pour revenir à ce qui rend Hadès particulier : dans les jeux de type roguelike, on progresse un peu, on meurt, on recommence, et ainsi de suite. L’histoire se dévoile petit à petit au fur et à mesure de la progression. Et la mort empêche de progresser. 

Dans Hadès, non. L’histoire de Zagreus, liée à celle de tous les PNJ qu’il croise, progresse à chaque mort. Car on obtient des bribes d’informations en discutant avec les PNJ qui habitent la maison d’Hadès, lieu de départ de chaque run. Mais ces discussions sont limitées à seulement quelques phrases échangées avant de s’interrompre. Pour progresser, le joueur doit donc se lancer dans un run, mourir, et revenir au point de départ pour obtenir de plus amples informations. 

La révolution d’Hadès est donc d’intégrer le mécanisme du gameplay à la conception narrative. A tel point que, au début du jeu, je me suis vraiment demandé s’il fallait réussir à s’évader, au risque de terminer le jeu en sortant des enfers avant d’avoir eu toutes les réponses aux questions soulevées par le récit. 

Sans rien divulgâcher : oui, il faut sortir ! L’histoire ne s’arrête pas là, et le jeu continue à nous inciter à faire des runs, encore et encore, soit pour le défi de survivre avec une difficulté croissante, soit, bien sûr, pour avoir le fin mot de l’histoire. 

D’ailleurs, le mécanisme est poussé encore plus loin, car après être arrivé à une conclusion, et avoir « terminé » le jeu (c’est-à-dire contemplé le générique de fin)… hé bien ce n’est pas encore vraiment fini. Car, outre les défis et quêtes qu’il reste à compléter, on peut encore progresser dans les histoires des PNJ, toujours en continuant à faire des runs et en discutant avec eux. 

C’est donc, pour moi, un savant mélange de défis à relever et de récits à conclure qui me pousse à continuer mes tentatives d’évasion. En conclusion, Hadès est notable par cette conception narrative novatrice, qui s’intègre parfaitement au gameplay, et transforme la punition d’un roguelike traditionnel en motivation pour continuer à mourir, renaître, recommencer. A l’heure où une suite d’Hadès a été annoncée, je ne peux que recommander ce jeu, particulier et attachant.

No responses yet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *